Après avoir suspendu brutalement les cantines, la Direction diocésaine de l’enseignement catholique (DDEC) de Nouvelle-Calédonie annonce leur réouverture le 12 novembre 2025. Une décision présentée comme un soulagement pour les familles, mais qui marque aussi le début d’une remise en question profonde de la gestion interne du réseau catholique.
Une crise révélatrice d’un malaise de fond
La DDEC avait invoqué un déficit colossal de 630 millions de francs CFP pour justifier la fermeture des cantines. Une alerte jugée disproportionnée par les collectivités.
L’État, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et les provinces ont bien versé leurs parts respectives. La province Sud, en particulier, a tenu l’intégralité de ses engagements, versant 620 millions de francs en 2024 et 459 millions en 2025, soit au-delà de ses obligations légales.
Une gestion interne opaque et coûteuse
Les causes du déficit ne relèvent donc pas uniquement d’un sous-financement, mais aussi de pratiques internes problématiques.
La note gouvernementale évoque notamment :
une politique sociale interne avantageuse (369 millions de francs d’avantages et primes en 2024),
l’absence de recouvrement des impayés pour l’internat et la cantine,
l’abandon de créances antérieures estimées à près de 500 millions de francs,
et un ratio personnel/élèves déséquilibré par rapport à l’enseignement public.
Autant d’éléments qui nourrissent les critiques sur l’opacité de la gestion de la DDEC, déjà épinglée par la Chambre territoriale des comptes en 2020 pour un manque de transparence.
Un audit exigé avant tout nouveau versement
Face à ces dérives, le Congrès de la Nouvelle-Calédonie a conditionné tout nouveau versement d’aide à la réalisation d’un audit complet de la DDEC. Objectif : garantir que les fonds publics soient utilisés de manière rigoureuse et ciblée.
Cet audit devra aussi accompagner une restructuration interne, avec un renforcement du recouvrement, une révision des avantages sociaux et une optimisation des ressources humaines.
Une reprise sous surveillance
Dans sa communication officielle, le directeur diocésain, Manoël Van Aerschodt, reconnaît une situation « fragile et instable » et annonce vouloir « intensifier les procédures de recouvrement ». Un virage tardif, mais nécessaire.
Car si la reprise des cantines apaise la tension immédiate, la DDEC devra désormais rendre des comptes sur sa gestion passée et prouver sa capacité à redresser durablement ses finances.
La province Sud en position de force
En coulisses, la crise a rebattu les cartes : la province Sud apparaît désormais comme l’acteur central du sauvetage du réseau catholique. Non seulement elle a maintenu son soutien financier, mais elle a aussi imposé la transparence comme condition de poursuite du partenariat.
L’enseignement catholique, longtemps protégé par sa position historique, se retrouve contraint d’entrer dans une ère de reddition des comptes.
Le temps des subventions automatiques est révolu et la DDEC le sait : pour continuer à servir 12 000 élèves chaque jour, il lui faudra d’abord prouver qu’elle sait gérer.















