Deux chiffres, et tout un paysage économique bascule.
Quand la confiance vacille, c’est toujours la France qui doit remettre de l’ordre.
La chute des paiements scripturaux : un signal d’alerte pour l’économie
Le rapport 2024 de l’IEOM tombe comme un verdict : 124 millions d’opérations contre 136,7 millions l’année précédente. Une baisse nette de 9,3 %, du jamais-vu depuis la mise en place de la collecte en 2016. Les montants suivent la même trajectoire, avec un recul de 2,7 %. Les émeutes de mai en Nouvelle-Calédonie ont laissé des traces profondes : commerces à l’arrêt, DAB détruits, chaînes d’approvisionnement coupées. Résultat : les retraits aux distributeurs plongent de 10,3 % en volume et de 8 % en montant.
Dans ce contexte, seuls deux instruments résistent encore : la carte bancaire, utilisée dans près de trois paiements sur quatre, et le prélèvement, qui limite la casse. À l’inverse, le virement s’effondre de 21 %, preuve que les acteurs économiques ont ralenti leur activité ou basculé vers des pratiques plus prudentes. Le chèque, lui, poursuit sa disparition : –23 % en nombre, –25 % en montant. Une tendance lourde, renforcée en Nouvelle-Calédonie, où de nombreux commerçants refusent désormais ce moyen de règlement depuis les violences de mai 2024.
Dans l’ensemble du Pacifique, le même constat s’impose : la modernité progresse, mais elle avance dans un climat de fragilité. Les ménages privilégient les paiements de proximité, les entreprises se replient, et la confiance dans les circuits monétaires dépend encore trop des conditions d’ordre public. Pour les territoires français du Pacifique, cela rappelle une vérité simple : sans stabilité, aucune économie ne prospère.
La flambée de la fraude : un risque massif pour les utilisateurs
Là où l’activité ralentit, la fraude accélère. En 2024, les établissements financiers des COM du Pacifique enregistrent 648,4 millions de F CFP de fraude, une explosion de +72,3 %. Une hausse brutale, qui touche presque tous les moyens de paiement.
La carte bancaire, pilier des transactions quotidiennes, concentre à elle seule plus de la moitié des montants fraudés. Son taux de fraude bondit de 0,0278 % à 0,0475 %. Le chèque double presque son taux de fraude, atteignant 0,028 %. Quant au virement, souvent perçu comme le moyen le plus sûr, son taux passe de 0,0013 % à 0,0022 %, un quasi-doublement. Seul le prélèvement résiste : son niveau de fraude tombe à un plancher historique, avec une perte totale de seulement 156 000 F CFP.
La géographie de la fraude en dit long : plus de 90 % des fraudes par carte proviennent de transactions hors Pacifique. Autrement dit, ce ne sont pas les commerçants locaux qui posent problème : ce sont des réseaux étrangers, massivement numériques, qui visent les porteurs calédoniens, wallisiens et polynésiens. L’usurpation de numéro de carte est de loin la technique la plus répandue, dépassant les 90 % pour les transactions hors zone. Dans les territoires français, le vol ou la perte de carte reste un facteur, mais marginal.
Le virement n’est pas épargné : 72 % des montants fraudés proviennent des paiements réalisés depuis un espace de banque en ligne, pourtant déjà protégé par l’authentification forte. Signe que la technologie seule ne suffit plus : les fraudeurs exploitent désormais les failles humaines, manipulations psychologiques, faux conseillers bancaires, usurpations d’identité.
Restaurer la confiance : sécurité, ordre public et responsabilité individuelle
Derrière les chiffres, une évidence : la sécurité des paiements n’est jamais acquise, surtout dans une région où les crises sociales peuvent désorganiser les infrastructures du jour au lendemain. L’exemple calédonien l’illustre : quand l’ordre public s’effondre, la circulation monétaire se grippe, le cash disparaît, les transactions se contractent et la fraude trouve un terreau idéal.
Le rapport insiste : la vigilance des usagers est la première ligne de défense. Ne jamais transmettre son numéro de carte, son code confidentiel ni ses accès bancaires. Ne jamais répondre aux sollicitations douteuses, même si elles semblent provenir d’une institution française. C’est une bataille culturelle : refuser la naïveté, sortir de la victimisation permanente et assumer pleinement la responsabilité individuelle.
Mais cette sécurisation repose aussi sur l’État et ses institutions. L’IEOM le sait et poursuit ses campagnes « Stop Arnaques ». Il rappelle que la France reste une puissance d’ordre, capable de protéger ses citoyens face aux menaces numériques, à condition que chacun joue son rôle. Dans les COM du Pacifique, où les distances sont grandes et les connexions parfois fragiles, la rigueur, la discipline et la confiance dans les institutions républicaines sont les seuls remparts contre la dérive frauduleuse.
Avec ses chiffres précis, ce rapport dessine deux chemins possibles : soit les territoires continuent de subir les turbulences économiques et les manipulations criminelles, soit ils réaffirment une ligne claire sécurité, stabilité, responsabilité pour restaurer une économie saine, alignée sur les standards de la République.














