Un congrès indépendantiste présenté comme un tournant… mais surtout un test grandeur nature pour un mouvement qui peine à convaincre au-delà de son camp.
À Bourail, le PALIKA promet l’« État de Kanaky », mais le pays attend avant tout du sérieux, de la stabilité et une ligne claire.
Un congrès anniversaire présenté comme un tournant… mais un mouvement en quête de crédibilité
Le PALIKA réunit responsables, élus et militants du 7 au 9 novembre à Bourail, sur le site de Téné, à l’occasion de son 50e congrès, accueilli sous le slogan « Dé yè péyua népê ro Kanaky », autrement dit « Installons l’État de Kanaky-NC ». Une formule symbolique, mais surtout révélatrice d’un projet qui ambitionne de s’imposer dans un pays fracturé.
Les arrivées sont prévues dès ce vendredi 14h, avant une coutume d’accueil fixée à 15h30.
Selon les responsables du PALIKA, trois thèmes dominent : la gestion de la crise territoriale, l’avenir institutionnel et la stratégie d’accession à l’indépendance. Sur le papier, le programme est ambitieux. Dans les faits, il traduit surtout une réalité : l’indépendantisme est aujourd’hui obligé d’admettre ses propres incertitudes.
Le parti affirme vouloir « reconstruire » un pays fragilisé, proposer des réponses sociales, économiques, et s’attaquer aux difficultés de la jeunesse. Mais aucune piste concrète n’est avancée, sinon la promesse très générale que le mouvement saura « prendre en charge » ces sujets. À l’heure où les Calédoniens demandent du pragmatique, le PALIKA répond encore par le conceptuel.
L’accord de Bougival comme boussole… mais un objectif final toujours déconnecté du réel
Deuxième thème : l’avenir institutionnel. Le PALIKA répète vouloir vulgariser les points de l’accord de Bougival et clarifier ses concepts, présentés comme le dernier marchepied vers l’indépendance. Ici encore, le discours se veut déterminé : il s’agirait d’un « ultime processus ».
Mais la stratégie pose une question centrale : comment parler d’indépendance dans un pays qui a massivement validé le maintien dans la France lors du troisième référendum ? Une réalité que les responsables du parti, eux, contournent.
Le PALIKA reconnaît avoir mené plus de 30 réunions d’explication en dix mois. Il affirme disposer d’un retour du terrain. Pourtant, aucun élément ne montre aujourd’hui un mouvement capable d’élargir son audience. La dynamique n’est plus là. La base existe, solide, mais minoritaire.
Le parti appelle aussi à « sortir des guéguerres internes », notamment avec l’UC-FLNKS, qui ne l’a pas épargné ces derniers mois. Une manière de dire, sans le dire, que l’unité indépendantiste n’est plus qu’apparente. Dans un camp où chaque composante prétend incarner la stratégie légitime, la cohérence est devenue rare.
Surtout, le PALIKA confirme qu’il partage l’appel de l’État et des acteurs politiques au retour du FLNKS à la table des discussions. Une position étonnante de la part d’un parti qui, tout en parlant d’intérêt général, continue de défendre une trajectoire dont la majorité du pays ne veut pas.
Entre inquiétudes institutionnelles, calendrier incertain et bataille électorale qui s’annonce décisive
Troisième thème : la mise en œuvre de la stratégie indépendantiste. Le PALIKA évoque ses outils politiques : l’organisation interne, le FNLKS, l’UNI. Des structures en constante recomposition, parfois fragilisées par les conflits de leadership.
Le parti demande une stratégie « claire », estimant que la séquence à venir sera « compliquée ». C’est un euphémisme : la Nouvelle-Calédonie traverse une crise économique, une crise sociale et une crise politique. La France, elle aussi, connaît des turbulences.
Face à ces réalités, le PALIKA reconnaît son inquiétude quant au calendrier du processus de Bougival. Le gouvernement central a pris du retard. Les institutions nationales sont instables. Les textes avancent moins vite que prévu. Une inquiétude légitime, mais révélatrice d’un point essentiel : l’indépendance est aujourd’hui plus loin que jamais.
Le congrès abordera aussi les élections provinciales, désormais prévues en juin 2026. Le parti y voit l’occasion de dérouler sa stratégie, d’affiner son discours et de faire de l’accord de Bougival le socle de sa future campagne.
Mais là encore, la question demeure : comment gagner une élection quand la majorité du pays attend d’abord la sécurité, le développement, l’apaisement, la stabilité institutionnelle ? Autant de priorités que l’indépendantisme peine à incarner.
Et puis, il reste le rapport à la France. Le PALIKA critique, conteste, revendique l’émancipation, mais reconnaît en parallèle que le pays dépend de l’État pour l’avancée institutionnelle, les textes, le calendrier et même la stabilité politique.
Une contradiction que ce 50e congrès, malgré sa solennité et ses slogans, ne pourra pas masquer : la Nouvelle-Calédonie avance quand elle se rassemble, pas lorsqu’elle se divise.
Et à l’heure où le pays a besoin d’ordre, de travail, d’autorité et de résultats, le discours indépendantiste continue d’ignorer une évidence : la majorité des Calédoniens veut rester française, et surtout que l’on s’occupe du concret.















