L’économie réelle ne ment jamais. Derrière les discours compassionnels et les récits de crise permanente, les chiffres racontent une autre histoire.
Les ratios sectoriels 2024 ne sont ni une opinion ni un slogan.
Ils constituent un outil de lecture rigoureux, fondé sur des bilans d’entreprises, loin des postures idéologiques et des récits de victimisation.
Ce que mesurent réellement les ratios sectoriels de l’IEOM
Chaque année, l’Institut d’émission d’outre-mer élabore des fascicules de ratios sectoriels couvrant l’ensemble des entreprises exerçant une même activité en Nouvelle-Calédonie.
Pour 2024, 30 ratios économiques et financiers sont analysés et regroupés autour de cinq axes clairs : activité, structure d’exploitation, capacité bénéficiaire, répartition des revenus et autonomie financière.
Les entreprises sont agrégées selon leur activité principale, sur la base de la nomenclature d’activités française NAF rév. 2 (2008), au niveau des sections et divisions.
L’unité statistique retenue est l’unité légale, identifiée par un numéro T.A.H.I.T.I., désignée par simplification comme une « entreprise ».
La sélection est stricte.
Sont prises en compte uniquement les sociétés industrielles et commerciales :
– exerçant dans les collectivités françaises du Pacifique,
– réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions de francs CFP,
– ou présentant des risques bancaires déclarés excédant 25 millions de francs CFP.
Autre critère fondamental : la continuité comptable.
Une entreprise n’est intégrée que si elle a transmis deux bilans consécutifs via l’Espace de données entreprises (EDEN) de l’IEOM, quelle que soit la durée de l’exercice.
Lorsque celle-ci diffère de 12 mois, les ratios sont calculés au prorata temporis.
Enfin, la comparaison avec l’Hexagone repose sur une base solide.
Les ratios de référence sont produits par la Banque de France, selon une méthodologie strictement identique, à partir des données du Fichier bancaire des entreprises (FIBEN).
Il ne s’agit donc pas d’un parallèle idéologique, mais d’un outil de comparaison objectif.
Une activité en retrait, mais une création de valeur toujours présente
La lecture des ratios 2024 montre un ralentissement net de l’activité, notamment dans la construction et certains segments du commerce.
Le chiffre d’affaires recule, conséquence directe de la contraction de la commande publique, de l’attentisme économique et des suites des émeutes de mai 2024.
Pour autant, la valeur ajoutée médiane demeure significative.
Dans la construction, elle dépasse 36 %, un niveau proche de celui observé dans l’Hexagone.
Le message est clair : le savoir-faire productif existe encore, malgré un environnement institutionnel instable.
Le tissu entrepreneurial calédonien ne s’est pas effondré. Il s’est adapté, souvent sans aide, souvent sans visibilité.
Rentabilité comprimée : l’entreprise paie avant tout le reste
Les ratios de capacité bénéficiaire traduisent une réalité brutale. La rentabilité est là, mais sous pression constante.
En 2024, le taux de marge médian dans la construction avoisine 12 %, contre près de 19 % en métropole.
Dans le commerce, la rentabilité nette du capital reste faible, souvent inférieure à 5 %, et négative pour une part non négligeable des entreprises.
La répartition des revenus est sans ambiguïté. La part de la valeur ajoutée consacrée aux charges de personnel dépasse fréquemment 75 %, tandis que la part revenant à l’entreprise reste marginale.
Il n’y a ni spéculation massive ni enrichissement excessif.
L’entreprise calédonienne travaille d’abord pour faire tourner le système, pas pour accumuler.
Endettement maîtrisé, mais investissement à l’arrêt
Contrairement à certains discours alarmistes, les ratios d’autonomie financière montrent un endettement globalement contenu. Dans plusieurs secteurs, le taux d’endettement net est faible, voire négatif, signe d’une gestion prudente.
Mais cette prudence a un revers. Le taux d’investissement d’exploitation est souvent nul en 2024. Les entreprises n’anticipent plus. Elles attendent.
Sans stabilité politique, sans lisibilité fiscale, sans stratégie économique assumée, le capital reste figé.
Or, sans investissement, il n’y a ni modernisation, ni montée en gamme, ni souveraineté économique durable.
Les ratios sectoriels 2024 ne racontent pas une économie assistée.
Ils décrivent une économie disciplinée, productive, mais entravée par l’incertitude publique.
La Nouvelle-Calédonie ne manque ni de chefs d’entreprise ni de compétences.
Elle manque d’un cap clair, d’un territoire qui protège la production, valorise le travail et assume une vérité simple : sans création de richesse, il n’y a rien à redistribuer.
Les chiffres sont là.
Et ils parlent plus fort que les slogans.

















