Alors que la France traverse une crise politique inédite, la démission de Sébastien Lecornu, Premier ministre depuis moins d’un mois, résonne jusqu’à Nouméa. Entre inquiétudes, appels à l’unité et volonté de poursuivre le dialogue, les principales figures politiques calédoniennes livrent des réactions contrastées, mais unies sur un point : l’avenir du pays ne peut se jouer sans stabilité.
Emmanuel Tjibaou : « Le dialogue reste la seule voie pérenne »
Le député de la deuxième circonscription, Emmanuel Tjibaou, a réagi en appelant à la sérénité et à la continuité du travail engagé.
Dans ce moment d’incertitude politique à Paris, une chose reste claire : le destin de notre pays ne peut se construire sans la recherche sincère du consensus, a-t-il affirmé.
Pour le parlementaire indépendantiste, la démission du Premier ministre ne doit pas interrompre le processus engagé autour du dialogue post-accord de Nouméa. Il salue notamment l’initiative du groupe socialiste au Sénat, qui a déposé un amendement réaffirmant la nécessité d’une concertation incluant toutes les parties, y compris le FLNKS, « partenaire historique des deux précédents accords ».
Le FLNKS est un acteur incontournable. Aucun avenir durable ne peut émerger sans sa pleine participation, martèle Tjibaou, reprenant les mots mêmes de Manuel Valls, ancien ministre des Outre-mer, cité dans l’amendement.
Le député réaffirme les fondamentaux de sa ligne politique : respect de la parole donnée, reconnaissance de l’identité kanak, refus de tout passage en force, et surtout la construction d’un avenir commun.
Ces principes ne sont pas nouveaux, dit-il, ils sont simplement indispensables pour que notre pays puisse cheminer sereinement vers la pleine émancipation.
Nicolas Metzdorf : « Paris vaut bien une messe… et peut-être un miracle »
De son côté, le député de la première circonscription, Nicolas Metzdorf, livre une analyse plus pragmatique de la situation.
Nous avons vécu une démission, des spéculations, et finalement le choix du Président de missionner Sébastien Lecornu pour trouver un accord de stabilité politique dans les 48 heures, rappelle-t-il.
L’élu loyaliste détaille les scénarios possibles : formation d’un gouvernement de coalition, dissolution de l’Assemblée nationale, ou nomination d’un Premier ministre d’opposition.
Sébastien Lecornu a précisé qu’il ne serait pas le Premier ministre de ce futur gouvernement. Il est donc plutôt dans un rôle de négociateur actuellement.
Concernant la Nouvelle-Calédonie, Metzdorf salue le fait que le dossier calédonien ait été cité parmi les urgences nationales :
Il faut saluer et remercier Sébastien Lecornu d’avoir évoqué la Nouvelle-Calédonie dans son allocution parmi les dossiers urgents, insiste-t-il.
Il évoque enfin la possibilité que la loi de report des élections provinciales soit adoptée malgré la démission du gouvernement, afin de permettre une consultation des Calédoniens sur l’accord de Bougival.
Les choses évoluent d’heure en heure. Si l’adage dit que Paris vaut bien une messe, alors pourquoi ne pas raisonnablement espérer un miracle, conclut-il avec ironie.
Sonia Backès : « Une crise politique sans précédent »
La présidente de la province Sud et leader du camp non-indépendantiste, Sonia Backès, adopte un ton grave :
La démission de Sébastien Lecornu est le signe d’une crise politique sans précédent à l’échelle nationale.
Elle appelle à la responsabilité collective face à une situation qu’elle juge préoccupante :
Cette crise arrive au plus mauvais moment pour la Nouvelle-Calédonie. Quel que soit notre bord politique, nous aurons besoin d’être unis pour faire face aux difficultés générées par cette crise.
Entre incertitude et espoir
Dans l’attente des décisions de l’Élysée, le climat politique reste suspendu. À Paris comme à Nouméa, chacun mesure les conséquences d’une instabilité nationale qui pourrait ralentir, voire bouleverser, le calendrier calédonien.
Entre le pragmatisme de Metzdorf, l’appel au consensus de Tjibaou, et la prudence de Backès, la classe politique calédonienne se retrouve pour une fois sur un point d’accord : sans unité, le pays risque d’être la première victime d’une crise qui, cette fois, dépasse largement les frontières du Pacifique.