Il y a des matins où prendre la voiture relève moins du déplacement que de la survie organisée. Et ce n’est pas un effet de style. Au fil des témoignages, une évidence s’impose : nos routes sont devenues un parcours d’obstacles, un patchwork d’infrastructures mal pensées et de comportements complètement déconnectés du bon sens.
On peste, on klaxonne, on évite de justesse. Et tout le monde fait semblant que c’est normal.
Alors non, ça ne l’est pas. Pas du tout.
Mini-ronds-points : les chefs-d’œuvre d’ingénierie ratée
Qui a eu l’idée géniale de ces ronds-points peints au sol, versions miniaturisées de ce que devrait être un carrefour giratoire digne de ce nom ?
Résultat ?
Personne ne les respecte. Personne ne ralentit. Tout le monde roule dessus, comme si c’était un simple motif décoratif sur la chaussée.
Et quand, par miracle, un automobiliste décide de le prendre correctement, il manque de se faire rentrer dedans par celui qui a décidé que la ligne droite, c’est la vie.
Un rond-point censé « sécuriser » devient donc un point de collision potentiel. Bravo la conception.
Le feu piétonnier invisible : Portes-de-Fer, le grand mystère
Portes-de-Fer détient sans doute le record du feu le plus mal placé de la Nouvelle-Calédonie.
Un feu qui ne commande rien, que personne ne remarque, et dont l’existence semble aussi mystérieuse qu’inutile.
Les automobilistes passent : rouge, vert, orange, peu importe.
Pourquoi ?
Parce qu’il n’est pas à la bonne hauteur, pas visible, pas intégré à la dynamique du carrefour.
Mais oui, tout va bien : on laisse un feu dépérir dans un coin, sans visibilité, en espérant que quelqu’un devinera sa présence.
Marquages au sol : un décor ignoré
Les lignes continues ? Coupées.
Les zebras ? Traversés.
Les séparateurs de voies ? Décoratifs.
En Calédonie, le marquage au sol, c’est une suggestion artistique.
On change de file sans clignotant, on déboîte sans regarder, on dépasse où c’est interdit.
Le code de la route devient un folklore local, chacun sa version, chacun sa règle.
Voies d’insertion absurdes : Montravel et Rivière-Salée, pires que des pièges à voitures
Demandez à n’importe quel conducteur :
L’insertion à Montravel ou à Rivière-Salée, c’est un sport extrême.
À Montravel, tu as quelques dizaines de mètres pour t’insérer entre des véhicules lancés pleine vitesse.
À Rivière-Salée, c’est encore mieux :
25 mètres pour s’insérer… mais 600 mètres pour ceux qui arrivent de Ducos avant de se rabattre.
Résultat : freinages brusques, files qui se croisent, chauffeurs qui s’énervent, embouteillages quotidiens.
Un cocktail explosif.
Et pourtant, aucune modification, aucun recalibrage.
Silence radio.
Clignotants : l’option la plus rare du marché
Ah, le clignotant…
Cette magnifique invention, cette petite tige à gauche du volant, symbole universel du civisme au volant.
En Nouvelle-Calédonie ?
Une option premium, que certains doivent payer en supplément vu la rareté de son usage.
Tu attends qu’un véhicule tourne ?
Il ne tourne pas.
Tu attends qu’il continue tout droit ?
Il tourne sans prévenir.
La loterie du conducteur calédonien :
50 % intuition, 50 % freinage d’urgence.
La sortie des magasins : la ligne continue massacrée
Prenez un parking, mettez une sortie avec une ligne continue, ajoutez un panneau « Interdiction de tourner à gauche ».
En Calédonie, cela devient :
« Je vais tourner à gauche parce que j’ai envie. »
Le pire ?
Les conducteurs s’arrêtent, bloquent la circulation, attendent une ouverture, impossible, pour quand même couper la circulation.
Et s’il faut bloquer 10 voitures derrière, tant pis.
Le bon sens ?
Aux abonnés absents.
Et pour couronner le tout : le camion qui perd son liquide sur le col de la Pirogue
Nous avons eu droit au sketch du jour : un camion qui laisse derrière lui une longue trace de liquide.
Gasoil ?
Eau ?
Vidange ?
Littéralement, personne ne savait.
Les appels se succèdent : C’est du gasoil, faites attention ; Non, c’est de l’eau ; Non, c’est du vin ; Non, c’est un camion de vidange.
Bref, c’est dangereux.
Mais on laisse la route se transformer en patinoire, le temps que les usagers se débrouillent.
Et tant pis pour les motos.
Il est temps d’arrêter de jouer avec la vie des gens
On peut pointer du doigt les conducteurs, les râleurs, les distraits.
Mais les faits sont là :
nos routes sont mal conçues, mal signalées, mal entretenues.
La sécurité routière, ce n’est pas une décoration.
C’est une responsabilité publique.
Le jour où un enfant se fera renverser à un feu ignoré, où une famille se fera percuter à un rond-point peint au sol, on dira :
« On ne pouvait pas savoir. »
Eh si, on savait.
Depuis longtemps.
Il serait temps d’agir.















