Il y a des initiatives qui passent, et d’autres qui laissent une trace. La Caravane de l’entrepreneuriat, déployée du 4 au 14 novembre 2025 sur l’ensemble du territoire, entre collèges, lycées et tribus, appartient clairement à la seconde catégorie. Soutenue par le Medef-NC et de nombreuses entreprises engagées, elle a permis d’observer, presque en temps réel, le rapport des jeunes calédoniens à l’esprit d’entreprise.
Nous avons voulu sortir l’entrepreneuriat des salles de réunion pour le remettre au cœur des réalités du terrain
résume un organisateur.
Une initiative itinérante qui a sondé le terrain calédonien
La Caravane a traversé le territoire comme un laboratoire mobile d’idées, d’ateliers et de rencontres. En l’espace de dix jours, elle a multiplié les échanges directs avec des centaines de jeunes, offrant des ateliers pratiques, des témoignages et des mises en situation.
On a vu des regards s’allumer dans des endroits où l’entrepreneuriat semblait pourtant loin
explique un enseignant. Son objectif était clair : montrer que créer, entreprendre, oser n’est pas réservé à une élite ou à un centre urbain.
En tribu comme en lycée technique, les questions ont fusé, souvent très concrètes : financement, obstacles, discipline, erreurs à éviter.
Les élèves nous demandaient surtout comment commencer sans argent et sans réseau
confie une entreprise partenaire. Au fil des étapes, un constat s’impose : l’envie existe, la créativité est là, mais la méconnaissance des outils reste massive.
On a vu que beaucoup d’idées restent dans les carnets faute d’accompagnement
note une intervenante.
Un rapport d’anthropologue pour comprendre ce que pensent vraiment les jeunes
Pour aller au-delà de l’impression générale, la Caravane a été suivie par Véronique Mézille, anthropologue de la société Anyways, missionnée pour analyser les réactions, débats et prises de parole.
L’observation montre une forte attente des jeunes vis-à-vis du monde économique, mais aussi une méfiance liée au manque de repères
résume-t-elle. Son rapport, sera présenté lors de la conférence de presse du jeudi 4 décembre au Medef, et met en lumière une jeunesse souvent motivée, mais en quête de structuration, d’encadrement et de visibilité sur les métiers d’avenir.
Ils veulent entreprendre, mais ils veulent surtout comprendre les règles du jeu
analyse l’anthropologue. L’étude souligne une autre réalité : les territoires éloignés souffrent d’un déficit d’information plus marqué que les établissements des centres urbains.
Dans certaines tribus, les élèves découvrent l’existence même du statut d’auto-entrepreneur
observe un professeur. L’anthropologue met également en avant l’importance des modèles inspirants et la nécessité de créer davantage de liens durables entre entreprises, établissements scolaires et institutions.
Quand un jeune voit un entrepreneur local lui dire que c’est possible, le message est plus fort que n’importe quel cours théorique
témoigne un chef d’entreprise.
Une mobilisation éducative et économique qui prépare la relève calédonienne
Aux côtés de l’anthropologue, une autre figure essentielle de cette édition 2025 : Julie Micheli, enseignante responsable du Parcours entrepreneurs au lycée Jules-Garnier.
Nous avons voulu montrer que l’entrepreneuriat peut devenir un choix d’orientation à part entière
explique-t-elle. Son analyse pédagogique rappelle que les jeunes ne rejettent pas l’idée de créer une entreprise : ils redoutent surtout d’échouer dans un environnement perçu comme instable.
Ce qui manque le plus, c’est de la visibilité et des repères concrets
insiste-t-elle. La participation active d’élèves lors de la conférence de presse confirme que l’expérience a été marquante. Certains ont présenté leurs premiers projets : boutique mobile, application de proximité, services ruraux, innovations artisanales.
On n’avait jamais imaginé qu’on pourrait créer quelque chose un jour
confie un lycéen. Cette dynamique révèle un point crucial : l’entrepreneuriat n’est pas un réflexe naturel en Nouvelle-Calédonie, mais il peut le devenir si les acteurs économiques continuent à accompagner, structurer et inspirer.
Quand ils comprennent qu’entreprendre peut être synonyme d’indépendance, beaucoup changent d’attitude
note un formateur. Le rapport final, propose des pistes concrètes : multiplier les interventions en classe, créer une plateforme dédiée, renforcer les passerelles entre entreprises et établissements, et soutenir les projets naissants.
Nous ne voulons pas une action ponctuelle, mais un écosystème
conclut un partenaire économique.
Un tremplin plus qu’un événement
La Caravane de l’entrepreneuriat 2025 n’a pas seulement déplacé des intervenants : elle a déplacé des idées.
Elle montre une jeunesse prête à s’engager, pour peu qu’on lui donne les outils, les exemples et la confiance nécessaires.
Les conclusions sont claires : l’entrepreneuriat peut devenir un levier majeur du développement calédonien, à condition que l’élan de cette tournée soit prolongé.
Les acteurs économiques et éducatifs ont désormais un point commun : ils savent ce qui manque, ce qui fonctionne et ce qui doit changer.

















