ASEAN, Golfe et Chine réunis à Kuala Lumpur : réponse commune aux tarifs US, ambitions géoéconomiques partagées.
Un sommet inédit entre Asie, Golfe et Chine face à la pression américaine
Le 27 mai 2025 à Kuala Lumpur, un sommet inédit a rassemblé l’ASEAN, le Conseil de coopération du Golfe (CCG) et la Chine. L’objectif ? Bâtir une nouvelle architecture de coopération Sud-Sud face à la montée des tensions commerciales, notamment les tarifs douaniers imposés par Donald Trump. Avec plus de 20 % du PIB mondial à eux trois, les participants affichent une ambition claire : réduire leur dépendance aux États-Unis tout en affirmant leur vision d’un monde multipolaire.
Ce sommet historique intervient dans un contexte d’escalade économique. En avril, Trump annonçait des droits de douane massifs sur les pays de l’ASEAN, allant jusqu’à 49 % pour le Cambodge. La riposte ne s’est pas fait attendre : la Malaisie, qui préside l’ASEAN en 2025, s’est posée en chef de file d’une réponse collective, appelant à une stratégie d’intégration régionale renforcée.
La Malaisie en première ligne contre les États-Unis
Au cœur de cette dynamique, le Premier ministre malaisien Anwar Ibrahim. Proche de Pékin, critique de la politique américaine au Moyen-Orient, il a profité de la visite de Xi Jinping en avril pour condamner les tarifs punitifs et louer le rôle stabilisateur de la Chine. Son discours a été sans ambiguïté : multilatéralisme contre coercition, dialogue contre menace.
Lors du sommet des ministres des Affaires étrangères de l’ASEAN, Kuala Lumpur a proposé une négociation collective avec les États-Unis, sorte de « bargaining bloc » face à l’unilatéralisme américain. Si certains pays préfèrent la prudence, la Malaisie, elle, affiche sa rupture stratégique. Elle a même officiellement demandé son adhésion aux BRICS en juillet 2024.
Face aux réticences de certains membres, la déclaration finale du sommet ASEAN rappelle tout de même la volonté de dialogue avec Washington, tout en refusant toute mesure de représailles immédiates.
L’axe ASEAN-GCC-Chine : ambitions économiques et message politique
Ce sommet tripartite marque une volonté d’élargir les partenariats économiques, au-delà des traditionnels alliés occidentaux. Dans leur déclaration conjointe, les participants soulignent leur engagement envers les principes de la Charte de l’ONU, la résolution pacifique des différends, et une coopération renforcée dans les domaines du commerce, de l’énergie et de la sécurité.
Le volet Moyen-Orient n’a pas été occulté. Le communiqué final condamne les attaques contre les civils, appelle à un cessez-le-feu permanent à Gaza, exige le rétablissement de l’eau, de l’électricité et de l’aide humanitaire, et soutient l’avis de la Cour internationale de Justice en faveur de la fin de l’occupation israélienne.
Mais derrière les mots, le message est clair : face à la domination économique américaine, une nouvelle géopolitique se dessine. Avec un commerce bilatéral ASEAN-GCC-Chine atteignant 1 150 milliards de dollars, cette alliance a de quoi peser lourd. Reste à savoir si elle survivra au-delà du mandat malaisien, tant les intérêts nationaux sont parfois divergents.