Un bras de fer diplomatique secoue le Pacifique. Aux Îles Marshall, la présidente Hilda Heine défie la décision des Salomon d’exclure les partenaires du prochain Forum.
Une lettre ouverte adressée aux Îles Salomon
La présidente des Îles Marshall, Hilda Heine, s’est opposée à la décision du Premier ministre des Îles Salomon, Jeremiah Manele, d’interdire la participation des partenaires de développement lors du prochain Forum des Îles du Pacifique (PIF) prévu à Honiara.
Dans une lettre datée du 8 août, elle a exhorté Manele et le secrétariat du Forum à « reconsidérer cette approche » et à préserver « l’héritage d’inclusion » qui caractérise l’organisation régionale.
Pour Hilda Heine, priver la région de ses partenaires – qu’il s’agisse des États-Unis, de la Chine, du Japon, de l’Union européenne, de l’Inde ou de Taïwan – équivaut à affaiblir la coopération régionale au moment où elle est la plus nécessaire. Elle rappelle que les dialogues avec les donateurs permettent de mobiliser des financements rapides et de maintenir une unité d’action face aux défis climatiques, économiques et stratégiques du Pacifique.
L’enjeu taïwanais au cœur du débat
Les Îles Marshall, avec Tuvalu et Palau, comptent parmi les rares alliés diplomatiques de Taïwan dans le monde. Ces trois pays militent pour l’inclusion de Taipei comme partenaire officiel du Forum, alors que Pékin accentue ses pressions pour marginaliser son rival.
L’an dernier déjà, une référence à Taïwan avait été supprimée du communiqué final du Forum sous l’influence chinoise. Cette fois-ci, Tuvalu a même menacé de boycotter la réunion si les discussions avec les partenaires étaient annulées.
Si la lettre de Heine adressée à Manele n’évoque pas explicitement Taïwan, son discours au parlement des Îles Marshall début août était sans ambiguïté :
Je crois fermement que le Forum appartient à ses membres, et non aux pays extérieurs. Les non-membres ne devraient pas dicter la manière dont notre organisation fonctionne.
Un Forum sous tension diplomatique
La décision de Jeremiah Manele s’appuie sur une réforme en cours du système de dialogue du Forum avec ses partenaires. Mais pour Hilda Heine, suspendre toute discussion cette année serait une « occasion manquée » à un moment crucial.
Elle insiste :
Retarder ces dialogues, alors que l’attention et la coopération mondiale sont essentielles, serait préjudiciable à toute la région.
Au-delà du duel entre alliés de Taïwan et partisans d’un rapprochement avec la Chine, c’est l’avenir de la coopération régionale qui se joue. Le Forum des Îles du Pacifique, créé pour unir les nations océaniques face aux grandes puissances, risque aujourd’hui de devenir l’arène où se cristallisent leurs rivalités.