Un attentat terroriste en plein été, une famille royale frappée en son cœur. Le 27 août 1979, l’IRA assassine Lord Mountbatten, héros de guerre et symbole de la Couronne.
Un attentat ciblant la famille royale britannique
Cet après-midi d’août 1979, au large du port de Mullaghmore en Irlande, le « Shadow V » prend la mer. À bord, Lord Louis Mountbatten, 79 ans, arrière-petit-fils de la reine Victoria, dernier vice-roi des Indes et oncle par alliance de la reine Élisabeth II. Quelques minutes plus tard, une bombe posée par l’IRA explose et le bateau se désintègre. Le corps de l’amiral est retrouvé mutilé, aux côtés de son petit-fils Nicholas (14 ans), de Paul Maxwell (15 ans) et de la lady Brabourne, décédée quelques heures plus tard. Plusieurs membres de la famille survivent, mais sont grièvement blessés, dont Timothy, le frère jumeau de Nicholas.
Pour la première fois depuis le début des « Troubles » en Irlande du Nord, une attaque visait directement la famille royale. Les terroristes irlandais frappaient non seulement un homme, mais le symbole vivant de l’Empire britannique. La presse de Londres traite les terroristes de « salauds d’assassins », exprimant la colère d’une nation entière. Le même jour, 18 soldats britanniques tombent dans une embuscade à Warrenpoint, dans ce qui restera l’opération la plus meurtrière de l’IRA.
Un héros de guerre devenu dernier vice-roi des Indes
Louis Mountbatten n’était pas un aristocrate de salon. Officier de la Royal Navy, il se couvre de gloire durant la Seconde Guerre mondiale. Commandant du HMS Kelly, il refuse d’abandonner son équipage, échappant plusieurs fois à la mort. Churchill le choisit pour diriger les « Opérations combinées » qui prépareront le débarquement en Normandie. En 1943, il devient commandant suprême des forces alliées en Asie, infligeant aux Japonais de lourdes défaites en Birmanie.
En 1947, Clement Attlee, Premier ministre travailliste, le nomme vice-roi des Indes. Sa mission : gérer la décolonisation. En cinq mois, Mountbatten conduit l’Empire vers la partition entre Inde et Pakistan. Adulé par Nehru, respecté par Gandhi, il est vu comme « le Sage » par les Indiens. La transition se fait sans bain de sang impliquant directement les Britanniques. Mais Churchill, attaché à l’Empire, ne lui pardonnera jamais cette indépendance concédée trop vite. Mountbatten reste pourtant pour l’Histoire l’homme d’État qui a su tourner la page impériale sans guerre civile généralisée.
Un symbole frappé au cœur de l’été
Au-delà de sa carrière militaire et politique, Mountbatten incarne une certaine grandeur britannique. Cousin de la reine Élisabeth II, oncle du prince Philip et mentor du jeune prince Charles, il est de ces figures qui assurent la continuité historique d’une nation. Sa mort brutale constitue un affront à la Couronne.
L’attentat choque non seulement Londres mais aussi une partie de l’Irlande elle-même, où de nombreux habitants dénoncent les méthodes terroristes. Plusieurs repentis livreront des informations précieuses qui affaibliront durablement l’IRA dans les années 1980. Le 5 septembre 1979, Londres organise des funérailles nationales à Westminster, où la nation rend hommage à « l’amiral de la Flotte » mort en mer dans l’attentat, fidèle à sa vocation.
Avec Mountbatten disparaît le dernier vice-roi des Indes, mais aussi un pilier de la monarchie. Son assassinat rappelle que le terrorisme vise toujours plus que des vies : il s’attaque aux valeurs, à l’histoire et à l’identité d’un peuple. En ce sens, le sacrifice de Lord Mountbatten n’est pas seulement une tragédie familiale, mais un drame national qui a renforcé la détermination britannique à défendre son unité face à la barbarie.