En Nouvelle-Calédonie, la crise frappe de plein fouet les centres aérés : fréquentation en baisse, fermetures de structures, avenir compromis.
Fréquentation en baisse : une crise qui s’installe durablement
En Nouvelle-Calédonie, les centres aérés connaissent une situation critique. La fréquentation des enfants a chuté de plus de 50 %, parfois jusqu’à 60 %, comparée aux années précédentes. Ce recul touche l’ensemble du territoire, y compris Nouméa et les communes environnantes.
Témoignage : « Je n’ai plus les moyens de mettre les deux, alors je fais tourner »
Avant, je mettais mes deux enfants au centre aéré à chaque vacances, sans me poser de questions. C’était pratique, ils étaient bien encadrés, faisaient des activités, voyaient d’autres enfants… Mais cette année, avec la hausse des prix, les courses qui coûtent de plus en plus cher, et mon conjoint qui a perdu son emploi, on a dû faire des choix.
Maintenant, je mets seulement l’aîné une semaine sur deux, et le petit reste à la maison avec moi ou avec ma mère. La semaine suivante, on inverse. Ça me fend le cœur, parce qu’ils aimeraient tous les deux y aller tout le temps, mais je ne peux tout simplement pas payer pour les deux à plein temps.
Et encore, je suis chanceuse d’avoir de la famille pour m’aider. Mais j’ai peur que les centres ferment complètement à force de perdre des enfants. On veut les soutenir, mais on n’en a plus les moyens. C’est devenu un luxe, alors que ça devrait être un droit.
— Laurence, 36 ans, mère de deux enfants à Dumbéa
Fermetures en cascade et réduction des services
Cette chute brutale de fréquentation a conduit à la fermeture de plusieurs centres aérés, notamment dans les communes plus au nord de la province Sud et dans le Grand Nouméa. Certaines associations n’ont plus les moyens de maintenir des sites ouverts avec si peu d’enfants inscrits.
En parallèle, des activités complémentaires, comme les mercredis pédagogiques, ont été arrêtées. Ces mesures traduisent un affaiblissement global du secteur, qui se répercute sur l’offre proposée aux familles calédoniennes.
Les familles renoncent, les structures s’essoufflent
Cette crise est étroitement liée à la situation économique difficile que traversent de nombreuses familles. En raison de contraintes budgétaires, beaucoup choisissent des alternatives moins coûteuses : confier les enfants aux grands-parents, ou les laisser à la maison.
Les inscriptions de dernière minute deviennent la norme, mettant les structures en difficulté pour anticiper leur organisation. Par ailleurs, si les formations d’animateurs restent remplies, les opportunités d’emploi dans le secteur diminuent fortement, compromettant la pérennité de l’encadrement qualifié.
Témoignage : « On s’ennuie… mais au moins on mange bien »
Je suis au centre aéré depuis le début des vacances. J’ai 14 ans, je suis en 3e. Franchement, y’a beaucoup d’enfants je trouve. Les animateurs sont débordés. Résultat : on fait pas grand-chose.
Il n’y a pas assez d’activités pour tout le monde. Parfois on passe la journée à attendre ou à refaire les mêmes jeux. Ça devient un peu lourd, surtout quand t’as envie de bouger ou de faire du sport. Mais bon, mes parents peuvent pas me garder à la maison, alors je viens quand même.
Le seul truc bien, c’est le midi. On mange bien, c’est varié, y’a des bons plats. C’est un peu le moment que tout le monde attend dans la journée. J’aimerais juste qu’on puisse faire plus de trucs, parce que sinon, c’est un peu comme rester à l’école, mais sans les cours.
— Lucas, 14 ans, Nouméa
Un modèle à l’épreuve, un avenir incertain
Si la tendance actuelle se poursuit, de nombreuses structures non-associatives risquent de ne pas survivre à cette crise prolongée. Dépendantes du nombre d’enfants accueillis pour fonctionner, elles ne disposent pas toujours du soutien institutionnel ou financier suffisant pour absorber le choc.
La baisse d’activité ne touche pas uniquement les enfants, mais désorganise l’ensemble de la chaîne éducative et sociale autour de ces centres. Sans mesure d’urgence ni stratégie de relance, c’est tout un pan du service à l’enfance qui pourrait disparaître.