Chaque 18 décembre, l’UNESCO met à l’honneur la langue arabe, parlée par plus de 400 millions de personnes et devenue l’un des piliers culturels, religieux et politiques du monde contemporain.
Cette journée célèbre un patrimoine immense, mais elle permet aussi une analyse lucide : la langue n’est jamais neutre.
Elle est un outil d’identité, de mémoire, mais aussi de puissance et d’influence géopolitique.
Dans un monde où les équilibres changent, la langue arabe est devenue un acteur à part entière : culturelle, économique… et stratégique.
Un rayonnement culturel incontestable
L’arabe est une langue de littérature, de poésie, de sciences et de philosophie.
Elle a porté l’âge d’or des mathématiques, de l’astronomie et de la médecine.
Elle structure l’un des plus grands ensembles civilisationnels de la planète.
Son influence culturelle se manifeste dans :
- les arts et la calligraphie,
- la musique,
- les traditions orales,
- la transmission du texte coranique,
- l’expansion de la pensée juridique et théologique.
Impossible de nier son importance : l’arabe est l’une des grandes matrices de la connaissance humaine.
Mais aussi un vecteur d’influence politique et religieuse
Dans le monde contemporain, la diffusion de la langue arabe est également liée :
- à l’influence grandissante du Golfe dans la finance et l’énergie ;
- à l’expansion médiatique (Al Jazeera, chaînes satellitaires) ;
- au développement des réseaux religieux et éducatifs ;
- à la montée des diasporas arabophones.
Cette réalité crée parfois des inquiétudes légitimes dans les sociétés occidentales :
- visibilité accrue de pratiques culturelles ou religieuses ;
- tensions identitaires ;
- craintes d’ingérences étrangères ;
- interrogations sur l’intégration.
La langue arabe n’est pas un problème mais l’absence de cadre et de vigilance, elle, peut en créer.
Quelle place pour la langue arabe en Nouvelle-Calédonie ?
La Nouvelle-Calédonie n’est pas directement concernée par les dynamiques migratoires moyen-orientales ou maghrébines.
Le territoire compte très peu d’arabophones, et la diffusion de la langue y est quasi inexistante, se limitant à quelques étudiants, voyageurs, diplomates ou professionnels de passage.
Mais la question linguistique reste centrale en Calédonie :
- coexistence du français,
- langues kanak reconnues,
- langues océaniennes (wallisien, futunien, bichelamar),
- diversité culturelle dans le Grand Nouméa.
Dans ce paysage déjà fragile, l’introduction de nouvelles influences linguistiques doit être maîtrisée et proportionnée, non pas par rejet, mais par réalisme :
un territoire de 270 000 habitants ne peut pas absorber toutes les dynamiques identitaires extérieures sans risquer de diluer ses propres équilibres.
La Calédonie n’a pas de problématique arabe.
Elle a une problématique d’équilibre culturel, et c’est déjà suffisamment complexe pour ne pas ajouter d’enjeux extérieurs.
La Journée mondiale de la langue arabe doit être saluée pour ce qu’elle est : une célébration culturelle légitime.
Mais elle doit aussi être analysée avec lucidité.
Dans un contexte de tensions identitaires et de recompositions géopolitiques, les langues sont des vecteurs d’influence parfois culturels, parfois politiques.
La vraie question n’est pas : « Faut-il célébrer la langue arabe ? »
Elle est plutôt :
sommes-nous capables de reconnaître le rôle culturel immense de cette langue tout en restant vigilants sur ses usages politiques ?

















