Encore une fois, les chiffres parlent plus fort que les slogans.
Derrière le discours officiel, la réalité économique française s’impose sans fard.
Une croissance réelle, mais artificiellement portée
La note de conjoncture de décembre 2025 de l’Insee confirme une chose : l’économie française n’est pas à l’arrêt, mais elle avance sous perfusion publique.
Au troisième trimestre 2025, le PIB progresse de 0,5 %, un chiffre supérieur aux anticipations initiales.
Cette croissance repose d’abord sur l’investissement des entreprises (+0,8 %) et sur la consommation publique, restée soutenue tout au long de l’année.
L’industrie manufacturière bénéficie d’un rattrapage, notamment dans l’aéronautique, où la levée progressive des contraintes d’offre permet une hausse de la production et des exportations.
Les exportations progressent de 3,2 %, tirées par des livraisons exceptionnelles, tandis que les importations restent élevées.
Résultat : le commerce extérieur redevient temporairement contributeur à la croissance.
Mais cette dynamique reste déséquilibrée. La consommation des ménages, elle, stagne depuis un an, incapable de relayer la reprise.
Autrement dit, la France produit, mais les Français consomment peu, signe d’un malaise profond.
Des ménages lucides, pessimistes et rationnels
C’est le cœur du diagnostic de l’Insee : le pessimisme français est massif et singulier.
Près de 64 % des ménages estiment que la situation économique du pays va se dégrader, un niveau sans équivalent en Allemagne ou en Italie.
Dans le même temps, leur opinion sur leur situation personnelle reste relativement stable.
Ce décalage révèle une fracture politique et institutionnelle plus qu’économique.
43 % des Français se disent optimistes pour eux-mêmes mais pessimistes pour la France, contre 23 % avant la pandémie.
Ils travaillent, s’adaptent, épargnent… mais ne croient plus à la trajectoire collective.
Cette défiance se traduit mécaniquement par une hausse durable du taux d’épargne, qui atteint près de 18 % à la mi-2026, freinant la consommation.
Ce comportement n’est ni irrationnel ni émotionnel : il est prudent.
Quand l’État hésite, les ménages se protègent.
Emploi, salaires, inflation : l’illusion de la normalisation
Malgré la reprise, l’emploi ne redémarre pas franchement. Les entreprises privilégient la reconstitution de la productivité plutôt que les embauches.
L’emploi salarié stagne, et les créations nettes reposent essentiellement sur les micro-entreprises, souvent contraintes plus que choisies.
Le chômage remonterait ainsi à 7,8 % à la mi-2026, sous l’effet combiné du ralentissement des embauches et de la réforme des retraites, qui élargit la population active.
Côté prix, l’inflation reflue fortement. À 0,9 % sur un an, la France affiche l’un des niveaux les plus bas de la zone euro.
Mais cette désinflation ne relance pas la demande.
Les salaires progressent peu, les revenus du patrimoine reculent avec la baisse des taux, et la pression fiscale augmente, notamment sur les ménages aisés.
Le pouvoir d’achat progresse moins vite que l’activité et reste quasi stable par unité de consommation.
En clair : la France va mieux sur le papier, pas dans le portefeuille ressenti.
La France de fin 2025 n’est ni en crise ouverte ni en véritable reprise.
Elle avance, mais sans confiance, sans moteur populaire, sans vision lisible.
Les ménages ne demandent pas des slogans, mais de la stabilité, de la clarté et du courage politique.
Faute de quoi, la croissance restera ce qu’elle est aujourd’hui : réelle, mais fragile et contestée.


















