
« Y penser souvent, n’en parler jamais », ou le moins possible. Se porter candidate à la maire de Paris, avant d’envisager de l’être à la présidentielle, Sarah Knafo s’interroge autant que ceux qui spéculent sur sa cote à la hausse. La jeune énarque (32 ans), eurodéputée, se dit surprise par l’ampleur de la « Knafomania » médiatique et politique qui la porte depuis un peu moins d’un an. Il y a peu, elle croise Laurent Wauquiez dans les coulisses d’un plateau télé : « Pourquoi parles-tu partout de l’union des droites de “Knafo à Darmanin”, donnant le sentiment d’écarter Zemmour ? » Réponse de Wauquiez : « Parce que dans mes meetings, les gens ne me parlent que de toi. » Soucieux de ne pas froisser le « Z », le député LR s’en est expliqué avec lui, le malentendu a, sans douleur, été dissipé. Pour autant qu’elle soit « surprise » d’avoir « le mojo » – pouvoir d’attraction et vista dans tout ce qu’elle entreprend –, Knafo sait cultiver sa bonne étoile. Sur les réseaux sociaux en particulier, usant de cet espace de débat pour répondre à tous ses contradicteurs par des raisonnements argumentés qui lui valent souvent le respect, si ce n’est la reconnaissance de ses adversaires. Ainsi cumule-t-elle 223 000 abonnés sur TikTok, 447 000 sur Instagram et 206 000 sur X.
Ses raisonnements argumentés lui valent le respect de ses adversaires
Une notoriété qui nourrit ses ambitions à Paris – pour commencer –, où Éric Zemmour s’était classé troisième à la présidentielle de 2022 avec plus de 8 % des suffrages. Le positionnement droite libérale décomplexée, attachée aux valeurs « tradis », cartonne dans les 8e, 16e et 17e arrondissements, ce qui permet à Reconquête de reléguer le vote RN loin derrière. Consciente de ses points forts, Sarah Knafo est trop fine politique pour s’emballer. Une éventuelle candidature à la mairie de Paris est, dans son esprit, soumise à plusieurs conditions. Outre son envie sincère de se jeter dans une campagne de terrain, sur laquelle elle ne se livre pas, Knafo a besoin d’un temps suffisamment long pour installer sa candidature. Or si les discussions budgétaires s’enlisent et se prolongent au-delà du 31 décembre pour cause d’ordonnances, ou de loi spéciale induisant la négociation d’un texte additionnel pour en corriger les effets négatifs, cela réduira considérablement le temps de la campagne parisienne. Cela impacterait peu Grégoire, Bournazel et Dati, voire Chikirou, mais handicaperait fortement la candidate Reconquête qui s’est encore peu exprimée sur les propositions concrètes sur lesquelles les Parisiens pourraient basculer.
Vers un accord de second tour ?
Autre incertitude qui taraude Sarah Knafo, les alliances de second tour. Dans son esprit, Paris est mûre pour basculer à droite selon le théorème des cycles en politique : la droite a tenu la mairie pendant vingt-cinq ans, s’est épuisée, puis la gauche l’a prise, pendant vingt-quatre ans, et arrive à épuisement. Mais pour que l’alternance s’opère et qu’elle y contribue, Knafo table sur un deal avec Rachida Dati au second tour, dans un scénario où le candidat Horizons (Pierre-Yves Bournazel) se rapprocherait du socialiste Emmanuel Grégoire. Improbable ? « Le clivage entre Bournazel et Dati est nettement plus marqué qu’entre Bournazel et Grégoire », veut croire Sarah Knafo. Un sénateur LR confirme que « la détestation d’Édouard Philippe pour Rachida Dati est telle – elle s’était acharnée sur lui lorsqu’il avait été mis en cause dans une affaire judiciaire au Havre – qu’il n’a, pour le moment, aucune intention de faire un pas vers elle ». Le candidat socialiste, d’ailleurs, ne se prive pas de souligner « la nocivité » de Rachida Dati et l’inconfort du candidat Horizons. Au point de parier sur un accord de second tour avec Bournazel ? Clément Beaune, l’ex-député de Paris et proche d’Emmanuel Macron, œuvre en coulisse pour créditer cette alliance a priori contre intuitive.
À l’inverse de Philippe, Sarah Knafo n’a aucun contentieux avec Rachida Dati avec laquelle elle n’a, jusqu’ici, aucun contact. Mieux, à ses yeux, une entente entre le bloc Reconquête/RN (entre 12 et 15 %) et la candidate LR serait « naturelle » et même un devoir pour ne pas permettre à la gauche de rallonger son cycle. Elle la soutiendra sans réserve si un accord est possible, sans exiger de poste au sein du futur exécutif municipal, souligne Knafo en privé, se contentant d’assurances sur le fond du projet. Beaucoup de « si », avec lesquels on pourrait mettre Paris en bouteille, conditionnent donc une candidature de la coqueluche de Reconquête. Décision attendue d’ici la fin décembre, promet Sarah Knafo. D’ici là, elle épluche « tout ce qui se dit sur Paris », bûche les chiffres et les dossiers. De façon à crédibiliser une candidature Reconquête qui, de toute façon, existera. Avec ou sans elle.
Télécharger l’application Le Journal du Dimanche pour iPhone, iPad ou Android



















