Deux images résument la situation : celle d’un territoire où les nakamal se multiplient sans contrôle et celle d’un État qui reprend enfin la main face aux dérives les plus flagrantes.
Car lorsque l’ordre recule, les trafiquants avancent et les Calédoniens en paient le prix.
Un contrôle qui dévoile un système organisé, pas un simple dérapage
Le 6 novembre 2025, policiers, gendarmes et douaniers mènent un contrôle conjoint dans le nakamal CITY FIVE. Ce qu’ils découvrent dépasse tout ce que les services anticipaient : une glacière pleine d’espèces, une balance, du cannabis conditionné pour la revente, un sac contenant du cannabis et de la cocaïne.
En quelques minutes, le décor est planté. Il ne s’agit pas d’un commerce de proximité ni d’un espace culturel autour du kava, mais d’un point de deal structuré, intégré au cœur d’un quartier déjà fragile.
Très vite, les investigations s’accélèrent. Le gérant, identifié comme propriétaire des produits saisis, est placé en garde à vue. Les perquisitions menées au nakamal et à son domicile révèlent une ampleur inquiétante : 1,129 kg de cannabis, quatre parachutes de cocaïne et 221 850 francs CFP en numéraire, autant d’indices d’une activité illicite massive et régulière.
L’intéressé reconnaît d’ailleurs les faits : plusieurs semaines de revente organisée au sein même du nakamal, où l’argent circulait abondamment, hors de tout contrôle et dans un mépris total de la loi.
Trois clients présents lors du contrôle sont eux aussi trouvés en possession de stupéfiants. Les procédures douanières engagées démontrent une réalité dérangeante : le lieu n’était pas un simple espace de consommation de kava, mais un spot identifié et fréquenté par une clientèle impliquée, consciente ou indifférente aux activités illicites qui s’y déroulaient.
Un établissement totalement hors cadre, symbole d’un laisser-faire devenu intenable
Au-delà des stupéfiants, une autre infraction tombe : le travail dissimulé. L’établissement n’a aucune existence légale, aucune déclaration, aucun cadre. Autrement dit, CITY FIVE opérait dans une zone grise totale, exploitant un nakamal comme une façade et rendant les contrôles quasi impossibles.
C’est précisément ce type de dérive que le gouvernement local cherche à enrayer avec son projet de loi du pays sur la réglementation des nakamal : préserver la dimension traditionnelle du kava tout en fermant la porte aux exploitations déviantes et dangereuses.
Mais lorsque les règles ne suffisent plus ou n’existent même pas l’État intervient. Le Haut-Commissariat constate une série de faits graves : troubles persistants, nuisances, trafics, exposition du voisinage à des risques majeurs, sentiment d’insécurité aggravé dans un quartier déjà sous tension.
L’absence totale de réponse du propriétaire achève de convaincre les autorités : CITY FIVE ne peut plus fonctionner. Sa fermeture est nécessaire pour éviter la récidive et stopper l’emprise croissante du trafic sur la vie locale.
L’État assume ses responsabilités : fermer pour protéger
L’arrêté signé par la directrice de cabinet du Haut-Commissaire est clair, ferme et implacable : CITY FIVE est fermé pour six mois, avec obligation d’affichage sur la devanture et possibilité de recours dans les délais réglementaires.
En cas de réouverture illégale, les sanctions pénales tomberont immédiatement.
Cette décision marque un tournant. Longtemps, les nakamal ont évolué dans une zone floue où tradition, commerce et dérives se mélangeaient, au détriment de la sécurité des Calédoniens. Aujourd’hui, l’État rappelle une vérité simple : la liberté n’est pas l’anarchie. Et lorsqu’un établissement met en danger les habitants, les forces de l’ordre et l’équilibre public, il doit fermer.
Ce geste fort intervient alors que l’exécutif local prépare un cadre légal pour encadrer les établissements de kava. Un cadre nécessaire, mais qui ne suffira pas sans une action déterminée de l’État. Car derrière l’argument culturel, certains exploitants ont créé de véritables zones de non-droit où l’on consomme, revend, trafique parfois en plein jour.
En fermant CITY FIVE, l’État envoie un message clair : plus aucun nakamal ne sera toléré s’il devient le pivot d’activités criminelles. Pas d’exception culturelle, pas de discours victimaires, pas de dérobade.
Les Calédoniens demandent de l’ordre : ils auront de l’ordre.
Dans une Nouvelle-Calédonie fragilisée par les tensions, la délinquance et les trafics, cette décision est plus qu’une fermeture administrative : c’est un rappel d’autorité. Un retour au réel. Une affirmation de la République là où certains pensaient pouvoir imposer leur loi.
Et si l’encadrement futur des nakamal est une étape nécessaire, l’action immédiate de l’État rappelle que la sécurité n’attend pas les débats : elle s’impose.

















