Deux ans après la signature locale de la Charte Romain Jacob, un constat s’impose : quand l’État et les institutions assument leur rôle, les résultats suivent.
Et en Nouvelle-Calédonie, certains refusent désormais que l’accès aux soins des personnes handicapées reste un angle mort des politiques publiques.
Une charte qui engage, une volonté politique assumée
Il aura fallu la détermination de Naia Wateou, membre du gouvernement chargée du handicap, et l’implication de Claude Gambey, en charge de la santé, pour remettre ce sujet au centre du débat public. Le 12 décembre, leur rencontre au Médipôle n’était pas une réunion de plus : c’était la preuve que la Nouvelle-Calédonie refuse désormais de laisser les personnes en situation de handicap affronter seules un système de soins trop souvent complexe, voire inadapté.
La Charte Romain Jacob, signée localement en décembre 2023, représente un engagement fort, porté dans 21 pays et soutenu par plus de 7 000 signataires. Son ambition ? Garantir un accès à la santé simple, digne et adapté pour toutes les personnes vivant avec un handicap. Un texte clair, fondé sur douze principes exigeants : égalité d’accès, personnalisation, formation, continuité, coordination, respect de la dignité et amélioration continue.
Si cette charte pèse autant, c’est parce qu’elle n’est pas un manifeste idéologique mais le résultat du travail mené par des personnes handicapées elles-mêmes, épaulées par l’association Handidactique. Une démarche pragmatique, concrète, où l’on attend des institutions qu’elles passent aux actes. Et c’est exactement ce qui commence à se produire.
Comme l’a rappelé Naia Wateou, « tout l’objectif est d’éviter la rupture de soins ». Une phrase simple, mais qui expose parfois des années de retard, d’imprécisions et de renoncements. Aujourd’hui, la priorité est claire : remettre de l’ordre, de la coordination et du sérieux dans un domaine où le laisser-faire n’a jamais été une option acceptable.
Des exemples concrets ont été présentés : visites blanches pour réduire l’angoisse des patients, anticipation des besoins matériels pour les fauteuils roulants, adaptation fine des parcours. Autant de gestes de bon sens, longtemps oubliés et enfin remis en place.
Un territoire mobilisé : coordination, réalisme et exigence
Cette rencontre de décembre avait un objectif clair : rappeler que l’accès aux soins n’est ni un privilège ni une faveur, mais une question de dignité. Ce sujet, souvent invisible pour les décideurs, impose pourtant une approche rigoureuse. Car la réalité est simple : sans coordination entre les institutions, les ruptures de parcours sont inévitables, surtout dans un territoire aussi contrasté que la Nouvelle-Calédonie.
Deux ans après la signature, un premier bilan s’imposait. Professionnels, associations, familles, structures territoriales : chacun a partagé réussites, blocages et besoins. Preuve qu’une dynamique existe, mais qu’elle doit encore être consolidée.
Naia Wateou l’a rappelé avec lucidité :
La charte ne s’appliquera pas de la même manière en province Sud qu’en province Nord ou dans les îles.
C’est précisément ce réalisme territorial trop souvent absent des discours politiques qui donne de la crédibilité au chantier engagé. Ici, pas de slogan, pas de posture : juste l’exigence d’une action publique cohérente.
L’enjeu est clair : poser les bases d’une vision partagée, alignée avec les projets territoriaux comme la Maison calédonienne de l’autonomie, les initiatives provinciales ou le travail associatif. Une ligne directrice simple mais assumée : renforcer les institutions, structurer les parcours, garantir un accès aux soins digne pour tous.
Au cœur du CHT : des actions concrètes et des résultats mesurables
Le CHT Gaston-Bourret a présenté une série d’actions qui illustrent un changement profond de culture. Ici, pas de théories : des dispositifs qui fonctionnent et transforment la vie des patients.
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Handisoins : la personnalisation comme standard
Le dispositif Handisoins coordonne désormais des parcours individualisés, anticipe les besoins matériels, évite des déplacements inutiles et garantit un accueil adapté. Plus d’une centaine de parcours ont déjà été suivis, dont de nombreux dossiers complexes, notamment en pédiatrie et en polyhandicap. Une approche efficace, rationnelle, centrée sur ce qui compte : la qualité du soin. -
Consultations délocalisées « Aller Vers » : le soin qui vient au patient
Pour les personnes incapables de se déplacer, le CHT a mis en place des consultations dans les lieux de vie : foyer Paul Reznick, Maison Gabriel Poedi, CASE de Nouville. Dentisterie, neurologie, interventions spécialisées : des actions concrètes qui réduisent le stress et évitent des trajets souvent épuisants. -
Comité Hospitalier Handisoins (C2H) : une gouvernance interne assumée
Créé en 2024, le C2H réunit directions, soignants, représentants des usagers et équipe dédiée. Sa mission : analyser les situations difficiles, proposer des solutions immédiates, suivre les améliorations et diffuser la dynamique de la Charte. -
Accessibilité renforcée : du concret dans l’infrastructure
Nouvelles places PMR au Médipôle, meilleure signalétique, réflexion sur les flux, simplification de l’accueil : des améliorations visibles et mesurables, appelées à s’étendre aux urgences, au bloc opératoire et à l’hospitalisation.
L’ensemble des partenaires l’a reconnu : ces actions changent réellement la vie des patients et facilitent le travail des soignants. Une démonstration simple, mais essentielle : quand les institutions reprennent la main et assument leurs décisions, les résultats suivent immédiatement.


















