Chiites vs sunnites
Un schisme ancien devenu conflit mondial
Le conflit actuel entre l’Iran et Israël ne peut être réduit à une simple guerre de missiles. Il plonge ses racines dans un clivage millénaire au sein de l’islam : celui entre chiites et sunnites.
Tout commence en 632, après la mort du prophète Mahomet. Les chiites estiment que le pouvoir devait revenir à Ali, gendre du prophète. Les sunnites reconnaissent l’autorité des califes élus. Ce désaccord a donné naissance à deux branches religieuses, devenues aujourd’hui deux pôles géopolitiques rivaux.
Les sunnites dominent numériquement et politiquement : Arabie Saoudite, Égypte, Turquie, Qatar, Émirats. Les chiites, bien que minoritaires, s’appuient sur l’Iran, l’Irak, le Hezbollah au Liban et les Houthis au Yémen.
L’Iran : bras religieux et militaire du chiisme
Depuis 1979, l’Iran se positionne comme le bastion du chiisme révolutionnaire. Son objectif ? Défier Israël, affaiblir les monarchies sunnites, et étendre un « croissant chiite » de Téhéran à Beyrouth.
Pour cela, Téhéran finance et arme des aliés :
- Hezbollah au Liban,
- Milices chiites en Irak,
- Réseaux chiites en Syrie,
- Houthis au Yémen.
Le conflit avec Israël n’est donc pas seulement territorial ou nucléaire. Il est aussi théologique et civilisationnel, dans une lutte d’influence religieuse et stratégique à l’échelle régionale.
L’Arabie Saoudite : silence pesant, calcul froid
Face à l’escalade, Riyad reste silencieuse. Mais ce mutisme n’est pas une neutralité. C’est une posture stratégique. En soutenant en coulisses les initiatives israéliennes (surveillance, coopération sécuritaire, cybersécurité), l’Arabie Saoudite laisse Israël affaiblir l’Iran sans se compromettre publiquement.
Ce silence s’explique par trois raisons :
- Éviter une guerre directe, qui menacerait ses infrastructures et son économie.
- Protéger les réformes de MBS -Mohammed ben Salmane- (Vision 2030).
- Contenir l’expansion chiite, en misant sur une normalisation douce avec Israël.
L’Union européenne : entre dépendance et vulnérabilité
L’Europe dépend toujours largement du pétrole du Golfe Persique. Or, 20 à 30 % du brut mondial transite par le détroit d’Ormuz, aujourd’hui sous menace directe.
Conséquences immédiates :
- Flambée du prix du pétrole, déjà amorcée.
- Tensions logistiques sur les flux maritimes (containers, matières premières).
- Inflation sur le carburant, le transport, les matériaux.
Pour l’Union européenne, ce conflit n’est pas seulement lointain : il menace sa relance économique, sa stabilité politique et sa souveraineté énergétique. Après le gaz russe, c’est un nouveau test de résilience géopolitique.
Nouvelle-Calédonie : vulnérable, isolée, exposée
En bout de chaîne, la Nouvelle-Calédonie pourrait être frappée de plein fouet. Dépendante à plus de 85 % des importations maritimes, le territoire est extrêmement sensible à tout choc énergétique ou logistique.
Les conséquences prévisibles :
- Hausse brutale du coût des carburants et du fret maritime.
- Tensions sur les prix alimentaires, les matériaux de construction, les services publics.
- Industrie du nickel fragilisée par les coûts énergétiques.
- Ralentissement de toute perspective de relance économique.
Dans un climat déjà explosif depuis mai 2024, ce type de crise internationale pourrait accentuer la fracture économique.
Conclusion
Ce qui se joue entre l’Iran et Israël dépasse largement leur frontière. C’est une guerre religieuse entre chiites et sunnites, une rivalité régionale instrumentalisée depuis des décennies, et désormais un bras de fer énergétique et géopolitique.
L’Arabie Saoudite observe en silence. L’Europe s’inquiète à voix basse. La Nouvelle-Calédonie, en bout de ligne, risque de subir le choc sans en comprendre l’origine.
Car parfois, une vieille querelle théologique à des milliers de kilomètres suffit à faire trembler les étagères du monde entier.