Ils annoncent la stagnation. Les chiffres, eux, racontent une Polynésie qui avance.
Dans un océan d’incertitudes mondiales, le territoire choisit le travail, l’investissement et la croissance.
Un climat des affaires qui résiste à tout : la confiance comme moteur national
Au troisième trimestre 2025, l’économie polynésienne renvoie une image rare dans le Pacifique : un climat des affaires au-dessus de sa moyenne de longue période, stabilisé à 108,8 points. Une performance d’autant plus remarquable qu’elle intervient dans un contexte mondial miné par les tensions commerciales et la montée des droits de douane américains. Les chefs d’entreprise interrogés le disent clairement : l’activité progresse, les effectifs se consolident, et la dynamique entamée en 2021 ne faiblit pas.
Ce résultat ne relève pas du hasard. Le tourisme, pilier stratégique, reste le premier contributeur de cette embellie. Plus de 84 000 visiteurs au troisième trimestre : une hausse de 14,9 % sur un an, qui enfonce un peu plus le clou d’une année déjà record. Depuis janvier, 214 000 touristes ont foulé le sol polynésien, soit 9 % de plus qu’en 2024. Les croisières intra-polynésiennes explosent, dopées par une offre accrue de cabines, tandis que les marchés asiatiques et européens s’installent comme locomotives de la croissance.
Dans le même temps, l’inflation reste contenue, maîtrisée à 1 % en glissement annuel. Une stabilité qui tranche avec la flambée observée chez plusieurs voisins du Pacifique. Les prix baissent dans l’habillement, les communications et les transports, compensant la hausse des loyers et de certains services financiers. À l’heure où nombre d’économies subissent encore les contrecoups des chocs internationaux, la Polynésie démontre sa capacité à tenir bon.
Le marché du travail, lui, ne ralentit pas. L’emploi salarié marchand progresse de 3,6 % en un an, porté par l’hôtellerie-restauration et la construction, deux secteurs à forte intensité de main-d’œuvre. Fin juin, les effectifs salariés augmentent encore de 2,5 %, confirmant un territoire où l’emploi se crée par l’activité, non par décret. Quarante pour cent des entreprises ont renforcé leurs équipes en 2025, même si les intentions d’embauche restent prudentes pour la fin d’année – une retenue classique dans un contexte de saisonnalité touristique.
Seul bémol : la consommation des ménages, atone. Le crédit à la consommation recule pour le troisième trimestre consécutif, avec une chute notable de 17,1 %. L’année 2024, dopée par l’endettement, ne se reproduit pas. Ce resserrement n’est pas forcément un signe de faiblesse : il illustre aussi une population qui consomme de manière plus vigilante, dans une logique de responsabilité économique. Une tendance cohérente avec un territoire qui valorise l’investissement plutôt que l’hyperconsommation.
Le tourisme explose, la construction se renforce : une économie qui prépare l’avenir
La Polynésie française avance avec une idée simple : un territoire ne peut prospérer qu’en misant sur ses forces structurantes. Le tourisme, déjà évoqué, écrase tout : hausse des nuitées, taux de remplissage porté à près de 79 % et performances supérieures à celles de 2024. Neuf entreprises du secteur sur dix déclarent une activité en hausse au troisième trimestre. Certes, une baisse saisonnière est anticipée pour la fin d’année un phénomène normal lié aux pluies et aux fêtes familiales. Mais la tendance annuelle reste puissante : la Polynésie n’a jamais autant attiré.
Deuxième pilier : la construction. Les crédits immobiliers demeurent robustes, soutenus par les ménages, avec une progression annuelle de 6,5 % des prêts immobiliers cumulés. L’État et le Pays injectent massivement via les grands chantiers : les dépenses publiques sont en hausse de 25,5 %, incluant les travaux liés à l’Éducation et à l’Aviation civile. Le BTP attend encore certaines concrétisations, mais les perspectives sont là, tangibles : Jeux du Pacifique 2027, infrastructures énergétiques, réseaux routiers, équipements portuaires. Les fondations d’une croissance durable sont posées.
Les entreprises ne s’y trompent pas. L’investissement repart : un quart des chefs d’entreprise prévoient d’investir dans l’année, et les crédits à l’équipement grimpent de 24,8 % sur douze mois. Le message est clair : le patronat croit en l’avenir du territoire et ne mise pas sur un modèle précaire. Dans l’agroalimentaire, même stabilité : gestion maîtrisée, vision à long terme et perspectives d’embauche.
Reste le secteur primaire, plus fragile. Les coûts d’exploitation augmentent, pesant sur la trésorerie, tandis que la perliculture subit la mise en place de tarifs douaniers américains défavorables. La rareté de la perle, pourtant favorable aux prix, ne se traduit pas par les hausses attendues. Le secteur devra faire preuve de résilience, mais son importance pour les exportations en fait un enjeu central des années à venir.
Face aux turbulences mondiales, la Polynésie choisit la stabilité et la projection
Le contexte international ne joue pas en faveur du Pacifique : tensions douanières, inflation persistante, ralentissement des grandes économies régionales. Pourtant, la Polynésie s’illustre par une trajectoire singulière : elle avance quand d’autres reculent. Le FMI maintient une croissance mondiale modeste, mais les États-Unis restent sur une pente ascendante. La zone euro oscille, l’Australie fléchit dans l’investissement public, la Nouvelle-Zélande recule, l’Indonésie ralentit. Dans ce maelström, la Polynésie retient une leçon simple : dépendre de sa propre dynamique, et non de celle des autres.
La croissance française, elle aussi, repart légèrement à la hausse, ce qui offre une bouffée d’air à un territoire étroitement lié à l’Hexagone. La Banque de France anticipe +0,7 % en 2025. Même le Japon revoit ses prévisions à la hausse grâce au pouvoir d’achat retrouvé. Tout cela dessine une tendance lourde : les économies capables de maîtriser l’inflation, de soutenir la production et de défendre leur marché intérieur tirent leur épingle du jeu.
C’est exactement ce que fait la Polynésie. Elle mise sur le travail, le tourisme, l’investissement et la stabilité. Elle refuse la facilité de la dépense publique débridée ou du repli victimaire. Elle avance parce qu’elle croit encore au rôle central de l’entreprise, du secteur privé et de l’investissement productif.


















