Lanceuse d’alerte sur le sujet de la «gabegie» des médias d’État, l’eurodéputée Reconquête dresse un constat implacable : face aux multiples dysfonctionnements, il est plus que jamais temps de privatiser.

Le JDNews. L’audiovisuel public est dans la tourmente. Fake news, attaques contre des concurrents, commission d’enquête à l’Assemblée nationale… Vous êtes l’une des premières à vous être attaquée à ce problème. Pourquoi ?
Sarah Knafo. Trois raisons. D’abord, la propagande : l’audiovisuel public ne respecte pas ses obligations de neutralité et de pluralisme. Ensuite, le coût : 4 milliards d’euros par an, alors que tous ses concurrents privés font des bénéfices sans toucher d’argent public. Enfin, une mission publique devenue obsolète : dans les années 1960, on avait une seule chaîne financée par l’État parce que personne, dans le privé, n’avait les moyens de financer une chaîne de télévision, vu l’ampleur des coûts fixes. Il n’y avait pas encore de marché. Aujourd’hui, la France compte 300 chaînes, sans compter les millions d’internautes qui peuvent monter leur propre chaîne en une après-midi. C’est quasiment gratuit : un ordinateur et un micro suffisent pour se lancer. L’audiovisuel public découle des besoins d’une époque. Cette époque est révolue. Il faut en tirer les conclusions et le privatiser. Sinon, l’État serait encore responsable de la manufacture des tabacs (la Seita a été privatisée en 1995), des allumettes (monopole d’État jusqu’en 1872) et du téléphone (France Télécom a été privatisée progressivement à partir de 1996) !
Vous avez parlé de « gabegie » en évoquant France Télévisions. Le mot est fort. Pourquoi l’employez-vous ?
Le rapport de la Cour des comptes est accablant. Dépenses somptuaires, frais de bouche et de déplacement qui donnent le tournis, effectifs pléthoriques, niveaux de salaires et avantages ruineux… France Télévisions est un gouffre financier.
Quelques exemples : 46 millions d’euros de frais de déplacement et de réception, soit 126 000 euros par jour. Achètent-ils les petits fours les plus chers du monde ? 3,8 millions d’euros de taxis, cela revient à plus de 10 000 euros par jour. Qu’est-ce qu’ils font avec un tel budget ? Des tours de périphérique ?
Nos impôts payent près de 9 000 personnes chez France Télévisions : cela signifie qu’on finance plus de journalistes et de personnel à France Télévisions que de chirurgiens à l’hôpital public, qui en compte moins de 6 000. On meurt aux urgences mais on finance la propagande et le divertissement ?
Chez France TV, 15 % des salariés gagnent plus de 80 000 euros par an et la Cour des comptes critique « des avantages en nature conséquents ». Le salaire et les avantages en nature de Delphine Ernotte sont estimés à près de 400 000 euros par an. C’est plus que le directeur général de Framatome, leader mondial de l’énergie nucléaire ! Si encore Madame Ernotte construisait des centrales nucléaires… France Télévisions vit dans un monde où tout est possible parce que l’argent vient d’ailleurs : de nos poches. Des poches qu’ils vident sans jamais dire merci.
Face à ces révélations accablantes, que fait la présidente Delphine Ernotte ? Rembourse-t-elle les Français ? Engage-t-elle un plan de réductions des dépenses ? Que nenni ! Elle contre-attaque en accusant d’autres chaînes. En français, on appelle cela de la diversion. Que Madame Ernotte s’occupe de ses journalistes qui complotent avec le PS avec notre argent, au lieu d’accuser les autres ! Elle voulait une télévision qui ressemble à la France, c’est une belle réussite ! Sa télévision est aussi endettée, inefficace, et insatiable d’argent public que notre État ! Nous ne voulons plus payer des impôts pour cela pendant que nos hôpitaux font des appels aux dons pour acheter du matériel.

Qu’appelez-vous la propagande du service public ? Le mot n’est-il pas dur ?
Je crois au contraire qu’aucun mot n’est plus adapté. Le service public a toujours penché à gauche, mais depuis que Delphine Ernotte est arrivée à la tête de France Télévisions, on a encore passé un cap. Elle avait commencé en critiquant « une télévision de blancs de plus de 50 ans ». Et elle s’est mise à couper des têtes tout de suite ! Elle a renvoyé David Pujadas, Julien Lepers, Patrick Sébastien, parce que c’étaient des hommes blancs de plus de 50 ans. Le racisme systémique qu’elle condamne à longueur de journée, c’est elle qui l’a mis en place chez France Télé, contre les hommes blancs ! En 2019, elle a introduit des clauses de diversité dans tous ses contrats de production. Traduction : pour toucher notre argent, les producteurs ont l’obligation de nous effacer de leurs séries, émissions, téléfilms pour refléter « la diversité de la population française et des étrangers vivant sur le sol de France, l’égalité hommes-femmes et la représentation LGBT ».
Les chiffres sont accablants. Les invités sont six fois plus souvent de gauche que de droite (institut Thomas Moore, 2024). Les personnalités de droite sont sept fois plus attaquées que défendues. Si vous pensez que c’est un hasard, Adèle Van Reeth, la directrice de France Inter, a déclaré au Figaro en 2024 : « Les faits, c’est que nous sommes une radio progressiste et que nous l’assumons. » À mes yeux, c’est du détournement d’argent public : ils détournent un service public, financé par de l’argent public, pour défendre des intérêts militants. Et je pèse mes mots. Nous arrivons toujours à la même conclusion : la privatisation.
Pourquoi ne pas, au contraire, si vous arrivez un jour au pouvoir, garder un audiovisuel public et le remodeler ?
Parce que mon but n’est pas de remplacer une propagande de gauche par une propagande de droite ! Je veux dépolitiser l’État, totalement. J’ai la même philosophie pour l’école : je ne veux pas remplacer les spectacles de drag-queens par des conférences de Némésis, malgré tout le bien que je pense de cette association. Je veux dépolitiser l’école, totalement.
S’il existe un média d’État, le pouvoir peut toujours finir par l’utiliser à des fins politiques. Une démocratie digne de ce nom ne doit plus avoir de journalistes d’État. Je suis pour la liberté d’expression, donc je trouve formidable qu’il existe des médias de gauche, de droite, d’extrême gauche, etc. Les médias ont le droit d’avoir une ligne éditoriale. Mais ils doivent la défendre avec les revenus de leur audimat, pas avec l’argent de nos impôts.
Pourtant, Bernard Pivot, et beaucoup de belles émissions culturelles officiaient sur le service public. On ne peut tout de même pas tout jeter !
Ne trouvez-vous pas qu’on est très loin de la télévision de Pivot ? Par ailleurs, croyez-vous vraiment que si France 2 avait été privatisé, Bernard Pivot n’aurait pas trouvé preneur pour son émission ? Bien sûr que si : cette émission cartonnait, il y avait un marché, donc des chaînes pour la diffuser. Regardez Thierry Ardisson, il est passé de France Télévisions à Canal+ avec exactement la même émission. On pourrait en citer beaucoup d’autres.

Quelle est aujourd’hui la spécificité éditoriale des programmes du service public ? On se cramponne au service public en s’imaginant que grâce à lui, on aurait accès à des émissions plus culturelles. Comme si France Télévisions passait des concerts philharmoniques ou des tragédies grecques à 20 heures ! À l’inverse, Radio Classique est une radio privée. « Fort Boyard », j’adore, mais est-ce ça, du service public ? Quelle différence avec « Koh-Lanta » sur une chaîne privée ? Quelle différence entre un match de l’équipe de France sur TF1 ou sur France 2 ? Aucune. France Télévisions fait la même chose que le privé : information, sport, jeux, talk-shows. TF1 a même porté plainte pour concurrence déloyale car France Télévisions bénéficie de subventions supérieures au chiffre d’affaires total du groupe TF1 pour faire la même chose.
Certains vous diront qu’on a besoin d’audiovisuel public pour que le gouvernement puisse passer des messages…
Ces arguments ne tiennent pas. Les messages du gouvernement sont diffusés sur toutes les chaînes qui facturent les espaces publicitaires comme pour n’importe quel annonceur. Et sur les programmes : on peut établir un cahier des charges. On peut toujours fixer des critères à des chaînes privées. Je rappelle que deux chaînes de télévision privée se sont vues retirer leur fréquence pour manquement, supposé, à leur cahier des charges. Vous voyez que la privatisation n’exclut pas un certain contrôle des engagements pris. Par exemple, exiger que celui qui reprenne France Culture maintienne une programmation avec de la musique classique, France Bleu une programmation régionale, etc.
Alors, comment réaliseriez-vous cette privatisation ? Est-elle seulement réaliste ?
C’est tellement réaliste que nous l’avons déjà fait en 1987, en privatisant TF1. Mon plan de privatisation est simple. En 1987, TF1 était une chaîne publique, payée par nos impôts. On a lancé un appel d’offres. Plusieurs entreprises se sont positionnées, et c’est Francis Bouygues, entrepreneur du BTP, qui s’est lancé dans les médias avec le succès que l’on connaît. Cela a rapporté un chèque de 3 milliards de francs à l’État. Aujourd’hui, le groupe TF1 fait autant d’audiences que France Télévisions, sauf que lui fait 300 millions d’euros de bénéfice et nous rapporte 75 millions d’euros d’impôts sur les sociétés, pendant que France Télévisions nous coûte 2,6 milliards d’euros chaque année et arrive quand même à être en déficit !
Alors, quel est mon plan de privatisation de l’audiovisuel ? On divise en lots, on lance un appel d’offres, on étudie les offres et on attribue aux mieux offrants, c’est-à-dire les meilleurs engagements de programmation et le meilleur prix. On peut exiger de vendre uniquement à des groupes français. En moins d’une année, on peut économiser 4 milliards par an et encaisser une rentrée d’argent immédiate. Ces chaînes devront être rentables, donc proposer des programmes que le public veut regarder. Moins de propagande, plus de programmes agréables, on ne paiera plus pour se faire insulter, et en plus, on aura des recettes fiscales. Que demande le peuple ? Tout le monde y gagnera, sauf Madame Ernotte bien sûr, car vu son salaire et son bilan, cela m’étonnerait qu’elle soit conservée par la nouvelle direction !
Malgré toutes ces critiques, les Français semblent attachés au service public comme le montre un sondage BVA/Cesi paru ce week-end. 69 % des Français en ont une bonne image. Ne craignez-vous pas que cette mesure soit impopulaire ?
Notons qu’en 2022, ce chiffre était de 85 % : c’est une sacrée baisse ! Par ailleurs, dans ce sondage, les Français disent qu’ils sont attachés à France 2, France 3, à certains animateurs et à certains programmes. Mais ils ne disent pas qu’ils sont attachés au caractère public de ces chaînes ! Ce sont deux choses différentes. En effet, la privatisation du service public ne veut pas dire la suppression des chaînes de service public. L’écran ne va pas devenir noir. Il n’y a qu’Emmanuel Macron qui ferme des chaînes de télévision, C8 et NRJ12 : ce n’est pas mon modèle.
Quand un repreneur privé arrivera, pourquoi voudriez-vous qu’il arrête les programmes et les animateurs les plus populaires ? Il a tout intérêt à les conserver. Quand TF1 était public, les gens y étaient très attachés. Une fois la chaîne devenue privée, l’attachement a même grandi. Les audiences le prouvent. D’ailleurs, quand ce sondage pose la question de la privatisation, en demandant si elle constituerait une amélioration ou une dégradation de la qualité des programmes, les réponses sont, en gros, 25 % pensent que cela va s’améliorer, 25 % pensent que cela va se dégrader et 50 % ni l’un ni l’autre ou ne savent pas. Je pense que les Français ont raison, cela ne changera pas grand-chose. Alors imaginez si le sondage avait posé la question du prix ? Je serais preneuse d’un sondage sur la question suivante : souhaitez-vous payer 130 euros par an pour conserver le statut public de France Télévisions et Radio France, ou préférez-vous les privatiser, avoir les mêmes programmes, mais garder vos 130 euros ? Je pense que l’on connaît déjà la réponse. Si l’abonnement à l’audiovisuel public était optionnel, ils n’auraient certainement pas 31 millions d’abonnés captifs, comme aujourd’hui.
Le service public, ce sont les fonctions essentielles de l’État : protéger, instruire nos enfants, soigner. Pas divertir et relayer la propagande
17 000 salariés, 108 000 emplois indirects. Pourriez-vous renvoyer tout le monde ? Est-ce seulement réaliste ?
Attention, on ne renvoie personne : on privatise. Ce sont deux choses différentes. Il y a des gens très compétents chez France Télévisions, des créatifs, des techniciens, et même certains journalistes, dont les repreneurs auront besoin et qu’ils seront ravis de conserver. Je n’incrimine pas du tout la profession dans son ensemble, mais le fait que tout ceci soit payé avec nos impôts.
Par ailleurs, les employés de l’audiovisuel public ne sont pas fonctionnaires. Ils sont des salariés de droit privé. Notre économie a encore un minimum de liberté : si le repreneur estime que la masse salariale est trop importante, que certains profils ne sont pas compatibles avec la modernisation des chaînes, il pourra faire un plan de départs volontaires, des licenciements indemnisés selon les règles du Code du travail, etc. Comme dans n’importe quelle entreprise.
Que garderiez-vous du service public ?
Le service public, ce sont les fonctions essentielles de l’État : protéger, instruire nos enfants, soigner. Pas divertir et relayer la propagande. On a des commissariats insalubres, on manque de munitions, de salles de classe, de défibrillateurs. Des policiers payent leurs gilets pare-balles eux-mêmes. Pourquoi voulez-vous que l’État mette notre argent dans « Fort Boyard » et « Cash Investigation » ? On est endettés de 3 300 milliards ! Cet État qui continue de financer l’audiovisuel public ressemble à un homme au RSA qui n’a déjà pas assez d’argent pour payer sa pension alimentaire et rembourser ses dettes mais qui prend des abonnements Netflix, Deezer et Spotify. Ce n’est pas responsable.
Le privé serait-il plus efficace pour assurer cette mission ?
Imaginez deux boulangeries côte à côte dans un village. L’une est privée, l’autre est publique. La boulangerie publique est financée par la mairie qui vous prélève une taxe exorbitante mais en échange vous avez droit à du pain « gratuit » toute l’année dans la boulangerie publique. En plus, le maire a créé un service, l’Arcom, chargé de surveiller de près les activités de ces deux boulangeries. Mais bien sûr l’Arcom ne surveille pas ses amis, elle ne surveille et ne sanctionne que la boulangerie privée. Il y a aussi des associations subventionnées par la mairie qui attaquent la boulangerie privée. Dans de telles conditions, la boulangerie privée devrait faire faillite. Pourtant c’est devant sa boutique qu’il y a la queue tous les jours. Et cela fait enrager toute la clique de la mairie. Pourquoi ? Parce que, pour le privé, satisfaire la clientèle est une question de survie. Alors, il faut se surpasser ou disparaître. Au contraire, la boulangerie publique peut se laisser aller sur la qualité de son pain, elle peut être très désagréable avec la clientèle et même l’insulter de temps en temps, car sa survie ne dépend pas de ses clients mais uniquement de la mairie. Cette boulangerie doit juste veiller à être très gentille avec le pouvoir pour durer. C’est l’histoire de l’audiovisuel public.
Imaginez la tête des dirigeants de France Info quand ils voient les chiffres des audiences de CNews ! Ils doivent se demander comment c’est possible. Ils doivent se dire : « Mais je ne comprends pas, on a fait tout ce qu’il fallait. Nous aussi on parle d’insécurité, on a fait venir les meilleurs sociologues marxistes pour rassurer les Français sur ce sentiment irrationnel. Nous aussi on parle de grand remplacement, on a parfaitement démontré que cela n’existait pas. Nous aussi on invite des gens de droite pour leur expliquer qu’ils ont tort. Alors pourquoi les gens préfèrent encore CNews ? »
Philippe de Villiers, tout seul en train de raconter la France avec des contes de Noël, fait plus d’audiences que France Info avec tous les moyens de l’État et les investissements dernier cri !
Nombreux sont ceux qui parlent d’une primaire de la droite « de Darmanin à Knafo ». Qu’en pensez-vous ?
Bonne idée ! Ce serait un premier pas vers l’union des droites que nous défendons avec Éric Zemmour. Tout ce qui permet de nous parler, de construire ensemble, pour redresser notre pays, est bon à prendre. C’est ce que les Français attendent. C’est ce dont la France a besoin. Nous ne sommes pas condamnés à avoir la droite la plus bête du monde. Je trouve de très bon augure que nous soyons d’accord avec David Lisnard, Laurent Wauquiez et Nicolas Sarkozy sur ce point.
On vous prête des velléités d’être candidate à Paris en 2026. Est-ce vrai ? Si oui, pourquoi y aller ?
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